Gotthardpass-shutterstock_2500719643_Web

Foto: Shutterstock

La motion du conseiller national UDC Benjamin Giezendanner pour l’ouverture de la route du col du Gothard toute l’année a eu un immense écho médiatique en Suisse allemande. Pour Pro Alps, cette intervention est extrêmement problématique en termes de politique des transports, de politique climatique et de politique constitutionnelle, et est tout simplement absurde.

Chaque année à Pâques, le Gothard offre le même spectacle : voitures, caravanes et autocars sont déjà alignés pare-chocs contre pare-chocs plusieurs kilomètres avant l’entrée du tunnel. Le volume de trafic augmente d’année en année. Or, l’ouverture de la route du col du Gothard toute l’année est une mesure inefficace, disproportionnée et anticonstitutionnelle.

Une augmentation de capacité anticonstitutionnelle

Ouvrir la route du col toute l’année reviendrait à augmenter la capacité à travers les Alpes. L’infrastructure actuelle ne permet pas une exploitation sûre en hiver. Pour la garantir partiellement, il faudrait construire à grands frais de nouvelles galeries paravalanches et des couvertures partielles. La route de col sécurisée en hiver créerait une possibilité de transit qui n’existe pas actuellement sous cette forme et augmenterait de fait la capacité totale – alors que l’alinéa 3 de l’article 84 de la Constitution fédérale stipule clairement que « la capacité des routes de transit dans la région alpine ne doit pas être augmentée ». L’argument selon lequel il ne s’agit pas d’une augmentation de la capacité, parce qu’aucune nouvelle route n’est construite, revient à dire qu’un aéroport n’augmenterait pas sa capacité s’il permet désormais aux avions de décoller et d’atterrir la nuit.

Inefficace et contre-productif

Toute nouvelle infrastructure de transport ou extension d’une infrastructure existante entraîne une augmentation du trafic à moyen terme. Ce phénomène est connu sous le nom de « trafic induit » et est scientifiquement prouvé. De plus, la proposition conduirait à ce que davantage de véhicules traversent les vallées alpines en dehors de l’A2, non seulement en été, mais aussi en hiver et principalement à Pâques. La population, qui souffre déjà des embouteillages, du bruit et des gaz d’échappement, n’est pas en mesure de supporter une telle situation.

Coûts d’au moins 300 millions de franc

Une circulation toute l’année nécessiterait des travaux de construction pour au moins 300 millions de francs. Ce chiffre ne tient pas compte de l’entretien annuel et des coûts d’exploitation supplémentaires. Cette somme est disproportionnée pour du trafic de vacanciers qui souhaitent aller plus vite vers le sud lors des fêtes de Pâques. La proposition manque donc totalement de mesure en ce qui concerne les coûts, et ce à une époque où l’on réclame des réductions à tout bout de champ.

Ne pas sous-estimer la rudesse de l’hiver alpin

Le déneigement à plus de 2’000 mètres d’altitude est une tâche exigeante et risquée. Les murs de neige font parfois plusieurs mètres de haut, la visibilité est précaire – et une avalanche peut se déclencher à tout moment. Pour que la route soit praticable toute l’année, les équipes de déneigement devraient se mettre en danger bien plus souvent encore. Tout cela en vaudrait-il vraiment la peine, juste pour pouvoir rester bloqué un peu plus tôt au prochain goulet d’étranglement, plus au sud ?

Une motion au mauvais moment

Le Conseil fédéral a récemment examiné l’idée d’une exploitation hivernale du col du Gothard. Il l’a rejeté en invoquant notamment un rapport coût-efficacité insatisfaisant. En mai, plusieurs interventions de commissions suivront pour être débattues au Conseil national. Elles visent à délester les vallées alpines du trafic d’évitement. Mais la mesure demandée ne ferait qu’aggraver le problème au lieu de le résoudre.

Vers le sud en train – en roulant plutôt qu’en restant debout

Avec le tunnel de base du Gothard, la Suisse dispose déjà d’une liaison efficace et écologique vers le sud. Afin d’éviter de devoir rester debout dans le train, les CFF mettent en place cette année encore de nombreux trains spéciaux autour de Pâques et mettent à disposition des places assises supplémentaires.

Pro Alps veut prendre le problème à la racine

La motion prouve que l’article sur la protection des Alpes doit continuer à être défendu. Pro Alps est expressément prête à participer à la recherche de solutions pour désamorcer les embouteillages au Gothard – en particulier lorsqu’il s’agit de réduire le volume du trafic et de le désengorger de manière ciblée aux heures de pointe. L’apparence selon laquelle la proposition du conseiller national Giezendanner apporte enfin une solution concrète est trompeuse : la discussion politique sur des solutions telles qu’un système de gestion des créneaux horaires ou un péage dynamique est en cours depuis longtemps déjà. Dans de nombreux pays européens, les systèmes de tarification pour le franchissement des Alpes sont depuis longtemps une réalité. Pro Alps participe à ces débats et continue à s’engager de manière constructive pour des solutions globales.

Mais ce qu’il ne faut pas, ce sont des mesures coûteuses, anticonstitutionnelles et finalement peu efficaces.

Plus sur le thème
Retour en haut de page